Soudain, on entend une porte claquer violemment... Beyla sort sur le ponton, les cheveux en bataille et l'air furieux : tout ce tapage, c'en est définitivement trop pour elle. Le voyage se fait long, pénible, ses réserves de miel et de sucreries sont presque épuisées et elle n'a pas fermé l'oeil de la nuit à cause des brigands qui, bien qu'en très mauvaise posture, semblent avoir décidé de jouer la carte de la provocation jusqu'au bout.
D'une voix rauque et totalement dépourvue de son enjouement habituel, elle s'adresse à ses compagnons :
" - Rassurez les marchands, je descends à la cale...
- Et que comptes-tu y faire ?, lui demande Farahn
- Leur donner une bonne raison de brailler... "
Sans autre discours, Beyla disparaît de l'embrasure menant à l'intérieur du navire et se rend aux cales. Elle intime aux mercenaires de lui céder le passage et leur conseille de se tenir légèrement à l'écart. Bientôt, elle se retrouve seule, face à une quinzaine de pirates attachés, sifflant et vociférant autant de railleries que d'insultes à son égard.
" Bande d'ordures ! Vous osez encore ouvrir vos grandes gueules alors que d'ici la prochaine lune, les vers feront ripaille sur vos cadavres pourrissants ! Gueulez ! Gueulez donc, marauds ! Et voyons qui de vous ou moi gueule le plus fort... "
A ces mots, un rugissement puissant et féroce provenant de la cale se fait entendre... suivi de nombreux cris, non plus de provocation mais de terreur...
Quelques instants plus tard, on n'entend guère plus de bruit à la cale que les grognements d'un ours bougon, lourdement assis sur le sol...